Accueil A la une Poussant vers une confrontation dans la rue : A quoi joue Ennahdha ?

Poussant vers une confrontation dans la rue : A quoi joue Ennahdha ?

Depuis le 25 juillet, Ennahdha et ses alliés mènent une guerre sans merci contre le Président de la République et tout le processus politique qu’il a engagé. Pour le parti islamiste, tous les moyens sont bons pour atteindre son objectif :  mettre fin à ce qu’il appelle un « putsch contre la démocratie ». S’agit-il d’une guerre médiatique, politique et diplomatique de sécession ? Sommes-nous face à un conflit de tous contre tous qu’engage le parti Ennahdha pour sortir avec les moindres dégâts possibles de cette situation politique qui menace son existence ?

La démocratie que défend Ennahdha a enfoncé la Tunisie dans une crise politique, économique et sociale depuis près d’une décennie, c’est, en tout cas, ce que pensent les sympathisants du processus du 25 juillet. Pour eux, le pays a été victime de faux consensus politique ayant mis à mal la situation économique et l’intérêt général du pays au profit d’intérêts personnels et partisans.

Quoi que le conflit entre Ennahdha et le Président de la République commence à prendre de nouvelles tournures et, désormais, la fin justifie les moyens, même s’il s’agit d’actes de sabotage et de chaos. Au fait, les partisans du Président de la République soupçonnent le parti islamiste d’implication dans des tentatives de provocation d’une crise sociale. A commencer par le retard dans le paiement des salaires, arrivant à la perturbation des circuits de distribution passant par les pressions étrangères et l’établissement d’un pouvoir politique parallèle. Pour eux, le parti Ennahdha est hors du contrôle et ne cesse d’envenimer la situation à des fins politiques et dans une tentative de sauver la position de son leader historique, Rached Ghannouchi, dont le pouvoir politique a été paralysé par le processus du 25 juillet. S’agit-il d’une guerre médiatique, politique et diplomatique de sécession ? Sommes-nous face à un conflit de tous contre tous qu’engage le parti Ennahdha pour sortir avec les moindres dégâts possibles de cette situation politique qui menace son existence ?

En tout cas, pour le moment, le Président de la République essaye d’éviter toute confrontation avec le parti de Rached Ghannouchi, appelant, en revanche, à l’application de la loi contre tous ceux qui sont impliqués dans des affaires de corruption.

En dépit de ces menaces, le parti islamiste poursuit sa stratégie de provocation. Dernièrement, il a appelé à une manifestation le 6 février, alors qu’un grand rassemblement des sympathisants du Président Kaïs Saïed et de tout le processus du 25 juillet est prévu durant la même date. Que peut-on déduire de ces agissements ? Ennahdha veut-il pousser vers une confrontation dans la rue dans une nouvelle tentative d’interpeller l’opinion publique internationale sur ce qui se passe en Tunisie ?

Vers une nouvelle confrontation ?

En effet, alors que des organisations nationales, des associations et des partis politiques ont appelé tous les Tunisiens à participer à la manifestation qui aura lieu le 6 février à 10h à la place du martyr Chokri Belaïd à l’avenue Mohamed V, le parti Ennahdha a, à son tour, appelé à un autre rassemblement. Le mouvement a appelé à manifester dimanche prochain à l’avenue Habib-Bourguiba, en signe de solidarité avec Noureddine Bhiri et pour exprimer son rejet de ce qu’il a qualifié de violations des droits et libertés. Ennahdha a, de nouveau, renouvelé sa demande de libération immédiate de Noureddine Bhiri et celle de toutes les personnes détenues de force, et pour contester les violations des droits et libertés depuis le 25 juillet 2021.

Le mouvement a également accusé l’autorité en place d’être à l’origine de la détérioration des conditions de vie des Tunisiens, de la vague de hausse des prix, du retard dans le versement des salaires des employés du secteur public et de « l’absence totale du gouvernement ».

D’autre part, les membres de la campagne « Citoyens contre le coup d’Etat » ont appelé à une manifestation, dimanche, à l’avenue Habib-Bourguiba, pour protester contre ce qu’ils qualifient de « graves violations des droits et libertés » et contre « la détention forcée du député et ancien ministre Noureddine Bhiri ». Ils expliquent que cette action exprime, également, le refus du « coup d’Etat » et dénonce les « persécutions sécuritaires » contre des activistes et des blogueurs.

Le poids des lobbies  

Il semble que le parti Ennahdha n’ait pas encore saisi la réalité de l’actuel échiquier politique. Et même si le parti de Rached Ghannouchi intégre de nouveau le pouvoir, la situation ne sera guère comme elle l’était il y a quelques années. Car le parti islamiste est, d’après les différents protagonistes politiques, responsable de la situation catastrophique dans laquelle s’enfonce le pays.

Il suffit de rappeler que le parti de Montplaisir n’a pas quitté, ou rarement, le pouvoir depuis 2011, et tous les gouvernements qui se sont succédé à la tête de l’Etat portent son empreinte. Le parti, frappé également par une crise en interne, est appelé, s’accordent les observateurs de la scène politique, à revoir ses choix, car même ses anciens dirigeants, comme Abdellatif Mekki ou Samir Dilou, reconnaissent qu’une sortie du pouvoir de Rached Ghannouchi aurait pu éviter le 25 juillet.

Encore faut-il le dire, Kais Saied a investi dans les faux pas de toute la classe politique qui a multiplié les mauvaises décisions durant dix ans post-révolution. Mais il semble que le poids des lobbies économiques s’avère beaucoup plus influent qu’il ne l’a imaginé. Certes, en monopolisant, ou presque, le pouvoir depuis dix ans, le parti de Rached Ghannouchi connaît certainement tous les secrets de tels lobbies, qui veulent tuer dans l’œuf toute initiative de changer la donne et en finir avec l’économie de rente.

Car nul ne doute que les liens entre les partis politiques et notamment le mouvement Ennahdha et ces lobbies est manifeste. Ils contrôlaient même certains votes sous le dôme de l’Assemblée des représentants du peuple suspendue pour maintenir le statu quo.

crédit photo : © Abdelfattah BELAID
Charger plus d'articles
Charger plus par Khalil JELASSI
Charger plus dans A la une

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *